Journées de Rochebrune 2001

Rencontres interdisciplinaires sur les systèmes complexes naturels et artificiels

Thème des Journées 2001

Expertise et Interaction

Les relations entre les agents qui demandent ou produisent de l'expertise

et les objets qui en résultent

La fonction de la recherche scientifique serait, selon une conception idéaliste, voire naïve, purement et simplement la production de connaissances, du savoir. Egalement idéaliste, voire naïve, serait l'idée que le savoir produit par les scientifiques/experts pourraît être directement appliqué à des fins pratiques. Le concept d'expertise suggère que ce transfert se constitue par l'interaction entre l'expert-producteur et le demandeur-consommateur à partir d'une situation qui pose problème et qu'il produit autre chose que du savoir : des jugements, des avis, des plans, des programmes, du logiciel… Ce transfert de la connaissance théorique aux questions pratiques est problématique pour plusieurs raisons:

  1. La fonction de la demande d'expertise. D'un côté elle peut être considérée d'un point de vue purement instrumental, c'est à dire pour résoudre certains problèmes du demandeur. D'un autre côté une expertise peut être demandée pour légitimer certaines décisions, ou encore les retarder (ceci est souvent les cas en politique où des commissions d'experts sont mises en place pour éviter de prendre des décisions qui pourraient être inopportunes à un certain moment)
  2. L'interaction entre experts. Si l'on pouvait supposer qu'il y ait une réponse unique à un problème donné, que l'expertise devrait découvrir, cela simplifierait les choses. Mais ce n'est pas le cas. Lorsque des théories divergentes s'affrontent pour rendre compte des mêmes phénomènes (voir en économie par exemple), les conséquences pratiques en matière de résolution de problèmes peuvent être différentes, voire contradictoires. L'expertise est ainsi marquée par des paradigmes concurrentiels.
  3. L'interaction entre expert et demandeur. La relation entre le demandeur et le producteur présuppose d'abord la compréhension mutuelle de ce qui est désiré (par le demandeur) et de ce qui est faisable (par l'expert). Pour les problèmes non routiniers, pour lesquels l'expertise des scientifiques est demandée, le demandeur est incapable de bien définir de ce dont il ou elle a besoin. L'expert est très souvent requis pour résoudre des problèmes mal définis et mal compris. Il lui faut alors reconstruire la problématique du demandeur d'expertise sans connaître d'avance la solution qu'il ou elle suggérera.
  4. Les objets produits sont des objets sémiotiques. Ils sont l'objet d'une interprétation de part et d'autre. Cette interprétation s'appuie sur les usages de métier, et le métier des chercheurs les amène à faire des interprétations différentes de celles des praticiens ou des politiques. La négociation du sens se fait-elle, et par quels processus ? Et quel rôle jouent les nouvelles technologies dans ce contexte? L'expert, en plus de ses connaissances, n'est-il pas celui qui sait faire le lien entre des langages différents, et prendre en compte les situations techniques et sociales dont les scientifiques font le plus souvent abstraction.

La thématique proposée pour les Journées de Rochebrune 2001 offre donc la possibilité de réflexions sur une multiplicité de problèmes qui concernent les experts des systèmes complexes artificiels et naturels et les objets qu'ils produisent. Les connaissances scientifiques sont-elles a priori utilisables pour des expertises? Quel est le rôle des paradigmes contradictoires à la base des théories scientifiques? Jusqu'à quel point ces paradigmes impliquent-ils des relations de pouvoir dans la recherche scientifique, dans le rapport des scientifiques aux demandeurs, dans la référence à la science comme argument d'autorité vis à vis d'options politiques ou sociales? Comment le langage de l'expert est-il traduisible et compréhensible dans celui du demandeur-consommateur d'expertise et réciproquement? Quelle est la fonction de l'expertise: clarification d'une situation ou résolution de problèmes? Quand et comment sert-elle de légitimation aux décisions politiques ou autres dans un monde dominé par une conception "scientifique" et "technologique"?

Chacun de nous peut être tour à tour expert et demandeur d'expertise. Nous proposons au cours de ces journées de considérer des travaux provenant de différentes disciplines, apportant des perspectives variées sur les relations et les interactions entre les experts, les expertises et les demandeurs.

Soumission des Contributions

Wolf-Dieter Eberwein, WZB - AG Internationale Politik, Reichpietschufer 50, D 10785 Berlin

Tel. 0040-30-25491-564 - Fax: 0049-30-25491-561 - Email: eberwein@medea.wz-berlin.de

Programmes des 3 workshops précédents

Le site de la conférence

 

 


Ces pages sont tenues par : Hervé Glotin , et sont herbergées à l'Institut D.M. d'Intelligence Artificielle Perceptive (IDIAP).

Dernière mise à jour : Nov 2000, commentaires à glotin@idiap.ch